Fumures du froment

Le rythme d’absorption de l’azote par le froment est faible en début de culture et s’intensifie à partir du stade redressement. Il devient très important à l’approche du stade dernière feuille. C’est quasi 50 % du prélèvement total d’azote qui se produira encore à partir de ce stade.

Le rythme de minéralisation est quasi parallèle à celui du prélèvement par la plante, mais il est nettement insuffisant pour couvrir les besoins de la plante, sauf dans le cas d’apports organiques très élevés et pour certains précédents légumineuses. Les quantités fournies par la minéralisation sont généralement inférieures à 100 kg N/ha.

L’importance et les parts respectives de ces sources d’azote peuvent varier en fonction des situations pédoclimatiques et culturales. Le fractionnement de la fumure permet une alimentation continue et adaptée de la plante à chaque situation. Il accroît le rendement, garantit la qualité technologique de la récolte et permet d’utiliser avec plus d’efficience chaque dose apportée (Figure 1).


Figure 1 : Absorption d’azote par le froment d’hiver, en fonction de son origine.
Les surfaces colorées sont proportionnelles à la quantité absorbées par la culture entre les différents stades.
La surface totale entre chaque stade est proportionnelle à la durée du cycle de la culture.


On observe que l’utilisation réelle (emploi de l’azote lourd 15N) de chaque fraction de la fumure est positivement influencée par le rythme d’absorption de l’azote par la culture. Par conséquent, pour l’apport hâtif de tallage, le coefficient d’utilisation (55 %) est sensiblement inférieur à celui de redressement (70 %) et de dernière feuille (75 % et plus).

Le rythme d’absorption de l’azote par le froment culture peut être scindée en trois phases :

Du semis à la fin tallage

La culture absorbe de 50 à 65 unités d’azote. Elle trouve principalement cet azote dans les reliquats de la culture précédente présents dans les couches supérieures du sol (0 à 50 – 60 cm) et les fournitures par la minéralisation automnale (surtout) et du début du printemps.

Le complément qui doit être éventuellement apporté par la fraction de sortie d’hiver de la fumure en dépend largement. Ainsi, une culture semée début octobre dans de bonnes conditions pourra plus facilement mettre à profit les fournitures azotées du sol présentes avant l’hiver et explorer une plus grande partie du profil. En sortie d’hiver, elle aura déjà produit un nombre suffisant de talles et absorbé l’azote nécessaire. Une fumure azotée à cette époque sera donc inutile. A l’inverse, une culture implantée plus tardivement dans un sol dont la structure serait abîmée, présentera des difficultés à se procurer dans le sol les faibles réserves du fait notamment du développement racinaire peu important. Un apport d’engrais azoté en surface permettra à la culture de couvrir ses besoins indispensables pour produire un nombre suffisant de talles.

Du stade redressement (épi à 1 cm) au stade dernière feuille

Durant la mise en place de l’appareil photosynthétique (le feuillage) et le développement de l’épi, les besoins deviennent importants. La culture absorbe pendant cette phase une bonne centaine de kg N/ha. Cet azote sera fourni par :

  • la minéralisation, qui avec le retour des bonnes températures au niveau du sol (entre la mi-avril et la mi-mai), peut selon les situations déjà fournir de 20 à 60 kg N/ha ;
  • la descente du système racinaire dans le profil qui permettra d’exploiter les reliquats plus ou moins importants présents dans les couches profondes ;
  • l’apport d’engrais azoté qui devra être bien adapté en tenant compte des fournitures du sol (minéralisation et reliquats) et de l’état de la culture. Cette fraction de la fumure permet en effet de réguler la densité de tiges qui montent en épi de manière à optimiser le rendement photosynthétique de la culture (400 à 500 épis/m²) et à limiter les risques de verse.

Du stade dernière feuille à la maturité

Plus de deux tiers de la matière sèche est produite durant cette période, le rendement en grains sera directement fonction de la qualité et de la durée de l’activité photosynthétique des surfaces vertes de la culture. L’alimentation azotée ne peut pas, pendant cette phase, être limitante sous peine de réduction du potentiel de rendement et de la teneur en protéines du grain.

La minéralisation est, à ce moment, très active. Selon la teneur et surtout la qualité de la matière organique du sol, elle peut fournir de 30 à 80 unités d’azote à la culture.

En général, au stade dernière feuille, le système racinaire a atteint sa profondeur maximale (1,5 mètre dans les bons sols) et a épuisé les réserves du sol. Cependant, dans les situations plus difficiles où la culture a rencontré des difficultés de développement racinaire, le stock encore présent en profondeur peut être exploité tardivement par les racines.

L’apport d’une quantité élevée d’engrais au stade dernière feuille permet d’alimenter en suffisance la culture pour assurer une fertilité maximale des épis, un bon remplissage et une qualité maximale des grains. L’importance de la dose d’azote à fournir dépend du niveau des deux autres sources (stock éventuel encore présent dans le sol et minéralisation) et du potentiel de rendement pouvant raisonnablement être atteint par la culture compte tenu de son état et des conditions culturales.

Lorsque l’ajustement de chaque fraction d’azote a été correctement réalisé, le reliquat en N minéral du sol à la récolte est minime (+/- 20 kg N/ha) et localisé en surface (0-30 cm).